Source sceptique majeure pour certains, paradoxe réinvestissant un anti-intellectualisme biblique pour d’autres, ce texte est une des entreprises de déconstruction des savoirs les plus radicales de la Renaissance. Principalement vulgarisé par une traduction tardive et fidèle donnée par un Réformé, il est parfaitement emblématique du milieu évangélique définissant un « entre-deux confessionnel » critique vis-à-vis de l’Église romaine, mais soucieux de l’unité de l’Église catholique. Source décisive d’autres textes pyrrhoniens de la fin du siècle (notamment le Quod nihil scitur de F. Sánchez), il pose un problème majeur de cohérence avec le reste de l’œuvre de Corneille-Agrippa, mettant à bas les disciplines professées et théorisées dans d’autres ouvrages par ce dernier. Un examen attentif des procédures logiques mises en œuvre pourrait non seulement contribuer à établir une meilleure connaissance du genre paradoxal, mais aussi permettre de cerner avec une acuité accrue l’articulation du scepticisme et de l’anti-intellectualisme propre à la tradition mystique. L’édition de ce paradoxe majeur, encadrée de plusieurs essais interprétatifs permettant de multiplier les angles d’attaque (spiritualité, philosophie, linguistique, etc.), permettra de travailler notamment sur l’articulation de la tradition du pyrrhonisme antique et de la théologie négative, tout en mesurant l’impact d’une telle combinaison sur la poétique renaissante des paradoxes, genre florissant dans la foulée de la redécouverte des Paradoxa stoicorum de Cicéron.
Publication prévue chez Droz, coll. « Cahiers de l’Humanisme ».